Le 28 avril 2025, Joseph Dion Ngute, Premier Ministre camerounais, et son homologue tchadien, représentant le Président Mahamat Idriss Déby Itno, inaugureront officiellement le pont sur le fleuve Logone. Cette infrastructure monumentale ne relie pas simplement deux rives – elle transforme l’avenir économique de toute une région.
Intégration régionale
Imposant et majestueux, ce pont de 620 mètres linéaires enjambe avec élégance le fleuve Logone entre Yagoua (Cameroun) et Bongor (Tchad). Sa conception répond aux standards internationaux avec une chaussée bidirectionnelle de 7 mètres et deux trottoirs de 1,5 mètre chacun. L’infrastructure ne s’arrête pas au seul franchissement du fleuve : 14,2 kilomètres de voies d’accès soigneusement aménagées (7,4 km côté Tchad et 6,8 km côté Cameroun) assurent une connexion fluide avec les réseaux routiers existants.
À Yagoua, l’aménagement d’un giratoire vient compléter l’ensemble pour fluidifier la circulation. Cette prouesse technique a été réalisée par le groupement d’entreprises Razel Cameroun/Razel-Bec/Sotcocog, sous l’œil expert du groupement Gauff GMBH&Co-Engineering KG/Cira-Sas/Technoroute, avec le Ministère des Travaux Publics du Cameroun comme chef d’orchestre.
Alliance financière
Le financement de cette infrastructure illustre parfaitement la puissance de la coopération internationale pour le développement. La Banque Africaine de Développement et le Fonds Africain de Développement ont investi massivement avec 46,881 milliards de FCFA. L’Union Européenne a complété ce dispositif par un don substantiel de 13,119 milliards de FCFA spécifiquement dédié aux projets socio-économiques connexes. Le Cameroun a également démontré son engagement avec une contribution nationale de 4,116 milliards de FCFA.
Plus qu’un pont
Cette infrastructure s’inscrit dans une vision bien plus large que le simple franchissement d’un fleuve. Elle concrétise les recommandations formulées lors de la 22ème session de la Grande Commission Mixte de Coopération Tchad-Cameroun de décembre 2010 à Yaoundé. Plus fondamentalement, elle incarne la vision stratégique du Président Paul Biya d’établir des connections solides entre le Cameroun et les marchés des pays limitrophes.
Ce pont devient ainsi la deuxième liaison terrestre entre le Cameroun et le Tchad, s’intégrant dans un réseau d’infrastructures transfrontalières qui inclut également le pont sur la Cross-River vers le Nigéria, le corridor Yaoundé-Brazzaville vers le Congo, et les futurs ouvrages prévus sur les fleuves Ntem et Kom. Cette stratégie dessine progressivement un Cameroun au cœur d’un réseau d’échanges interconnecté en Afrique centrale.
Catalyseur
L’ambition de ce projet dépasse largement la simple facilitation du transport de marchandises. Son impact sociétal a été pensé dès sa conception, avec une attention particulière portée à l’amélioration des conditions de vie des populations locales, prioritairement les femmes et les jeunes.
Un ambitieux programme d’infrastructures connexes accompagne le pont : routes communales pour désenclaver les villages, points d’eau pour améliorer l’accès aux ressources hydriques, écoles pour renforcer l’éducation, aires hydro-agricoles pour dynamiser la production locale, et soutiens ciblés aux activités d’élevage et de pêche. C’est tout un écosystème de développement qui prend forme autour de cette infrastructure.
Cette réalisation s’inscrit dans une dynamique plus large de transformation des corridors de transport en Afrique centrale. Le gouvernement camerounais a déjà annoncé pour le premier semestre 2025 le lancement des travaux de reconstruction stratégique des sections Ngaoundéré-Garoua et Tchakamaré-Kousseri. Parallèlement, des études approfondies sont en cours pour la réhabilitation des axes Maroua-Moutourwa et Magada-Yagoua.
Ces développements convergent vers un objectif clair : fluidifier le trafic sur l’axe Douala-Ndjamena, véritable colonne vertébrale économique pour toute la région, transformant ainsi les échanges commerciaux entre le Cameroun, le Tchad et au-delà.
Armand Arou