Le contrat de Partenariat Public-Privé (PPP) lié à l’exploitation de l’autoroute Kribi-Lolabé est en pleine mutation. Lors d’une réunion du comité interministériel présidée par le Ministre des Travaux Publics (Mintp) le 19 février 2025, les parties ont acté des avancées significatives. Parmi elles, le paiement du loyer 1 (L1), relatif à l’investissement du partenaire privé, prévu pour 2025. Une enveloppe de 40 milliards de FCFA a été provisionnée dans le budget du ministère pour cet effet. Cette décision marque une étape clé dans les négociations engagées depuis plusieurs mois entre l’État et l’exploitant KHM.
La révision du contrat PPP intervient dans un contexte où les recettes générées par l’autoroute sont bien en deçà des prévisions. Plusieurs facteurs expliquent ce déséquilibre. La lente occupation de la zone industrielle adjacente au Port Autonome de Kribi, le retard dans l’achèvement de la phase 2 du port, l’absence d’entreprises minières pressenties et la connectivité limitée due au non-démarrage de certains axes routiers clés ont pesé sur le trafic. À cela s’ajoute la faible fourniture en électricité, qui freine l’installation des entreprises dans la zone industrielle. Ces difficultés ont accru la contribution de l’État dans le paiement des loyers, notamment L1, L2 (exploitation et maintenance) et L3 (gestion).
Les recommandations du Mintp
Face à ces défis, le Ministre des Travaux Publics a formulé plusieurs recommandations. Parmi elles, la mutation du contrat PPP en contrat de marché public, conformément aux directives gouvernementales récentes. Cette transformation vise à simplifier les procédures et à accélérer les paiements. Le ministre a également insisté sur la nécessité de transmettre formellement le montant alloué aux charges d’exploitation, un point crucial pour la viabilité du projet.
Rappelons que le contrat PPP a été signé le 30 décembre 2020 entre le gouvernement camerounais et China Harbour Engineering (CHEC). D’une durée de 30 ans, il couvre le financement, la conception, l’exploitation et la maintenance de l’autoroute Kribi-Lolabé (38,5 km) et ses voies de raccordement (4,94 km). Le montant total de l’investissement s’élève à 293,55 milliards de FCFA, dont 77,31 % financés par l’État et 22,7 % par CHEC. Cependant, depuis sa mise en œuvre, le partenariat est confronté à de multiples difficultés, notamment des retards de paiement des loyers, des problèmes de gestion et des défis opérationnels.
Défis
KHM, l’exploitant de l’autoroute, a pointé du doigt plusieurs obstacles. Parmi eux, le non-respect des normes autoroutières par la cimenterie CIMPOR Cameroun, la construction de bâtiments non autorisés près du deuxième rond-point (PK38), et l’incivisme des usagers et riverains. Les accidents avec délit de fuite, les dégradations des infrastructures (glissières, filets latéraux) et les déversements de déchets dans l’emprise autoroutière sont fréquents. En outre, la présence massive de piétons et les dommages causés par les feux de brousse compliquent la gestion de l’autoroute.
La révision du contrat PPP et sa transformation en marché public pourraient apporter des solutions durables. Toutefois, la réussite de cette transition dépendra de la capacité des parties à résoudre les problèmes structurels, notamment l’amélioration de la connectivité, la fourniture d’électricité et l’attractivité de la zone industrielle de Kribi. Les prochains mois seront déterminants pour l’avenir de cette infrastructure stratégique.
Armand Arou