Le scandale qui ébranle la Commission des droits de l’homme du Cameroun prend une nouvelle ampleur alors que l’exécutif s’invite dans le bras de fer judiciaire opposant James Mouangue Kobila à son ancienne collaboratrice. L’affaire, qui a débuté par une plainte déposée début 2024, met en cause le président de la Commission des droits de l’homme pour des faits présumés de harcèlement sexuel.
Judith Nkouete Messah, l’ancienne directrice de cabinet de l’institution, a porté des accusations graves contre son ancien supérieur, dénonçant non seulement des actes de harcèlement sexuel, mais aussi des faits d’outrage à la pudeur, de chantage et de menaces. La plaignante décrit un mécanisme d’emprise qui aurait progressivement conduit à du harcèlement moral et à sa mise à l’écart professionnelle.
La justice s’est rapidement saisie du dossier, avec une première audience en février. Après plusieurs reports dus à son absence, James Mouangue Kobila a finalement comparu le 4 juin devant le tribunal de Yaoundé. Ses avocats ont obtenu le huis clos pour la suite des débats, malgré l’opposition de la défense de la plaignante. Le 3 septembre, lors de son audition, Judith Nkouete Messah a présenté des preuves, notamment des enregistrements de conversations authentifiées par l’Agence nationale des technologies de l’information et de la communication.
Face à ces accusations, le président de la CDHC a contre-attaqué en portant plainte pour diffamation contre son accusatrice et des journalistes de Naja TV, suite à une interview où elle maintenait ses accusations. Cette procédure parallèle a connu sa première audience le 4 juin, en présence de l’accusé.
L’affaire a pris une dimension politique lorsque Judith Nkouete Messah, licenciée “pour faute lourde” le 28 février 2024, a alerté les plus hautes instances de l’État. Ses courriers ont atteint le bureau du président Paul Biya, de la première dame Chantal Biya, et de plusieurs ministres clés du gouvernement. Le Premier ministre Joseph Dion Ngute est intervenu en ordonnant à la Direction de la police judiciaire d’ouvrir une enquête indépendante.
Cette mobilisation des autorités semble avoir donné un nouveau souffle à la plaignante, auditionnée par la DPJ le 29 avril 2024 en présence de son avocat. “C’est un parcours difficile, mais je reste déterminée à faire entendre ma voix”, affirme-t-elle, tout en contestant son licenciement qu’elle juge abusif, notamment parce qu’il est intervenu pendant un arrêt maladie.
L’affaire connaîtra un nouveau développement le 31 octobre, date à laquelle les deux parties se retrouveront devant le tribunal de Yaoundé pour la suite du procès pour harcèlement sexuel. D’ici là, les regards restent tournés vers cette affaire qui met en exergue la gestion des cas de harcèlement au sein des institutions camerounaises.
Armand Arou