Dans les coulisses du monde financier de l’Afrique centrale, une tension palpable monte entre la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) et le gouvernement camerounais. Au cœur de ce différend : le destin des “trésors oubliés” du système bancaire, ces avoirs en déshérence qui sommeillent dans les coffres des institutions financières.
Le 11 juillet 2024, la Cobac a lancé un pavé dans la mare en ordonnant aux banques de la région de geler tout transfert de ces fonds vers la Caisse des dépôts et consignations du Cameroun (CDEC). Cette directive fait suite à la décision audacieuse du Cameroun, prise en décembre 2023, de rapatrier ces avoirs dormants dans les caisses de l’État.
Le gouvernement camerounais avait justifié cette mesure par des motifs variés : héritages non réclamés, comptes tombés dans l’oubli, ou simples ruptures de contact entre les banques et leurs clients. Une initiative qui promettait de renflouer les caisses de l’État, mais qui a fait sourciller le gendarme financier de la région.
Absence de cadre juridique
La Cobac, gardienne de la stabilité financière en Afrique centrale, a rapidement tiré la sonnette d’alarme. Son argument principal ? L’absence criante d’un cadre juridique commun pour gérer ces fonds au niveau de la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC). Face à ce vide réglementaire, la Cobac a décidé de prendre les devants en lançant un chantier pour établir des règles du jeu communes.
Cette initiative de la Cobac vise à prévenir les risques opérationnels liés à la gestion de ces fonds et à éviter d’éventuels conflits juridiques. En clair, il s’agit de mettre de l’ordre dans la maison avant que chaque pays ne fasse cavalier seul.
Ce clash financier met en lumière les défis de l’intégration économique en Afrique centrale. D’un côté, des États soucieux de mobiliser toutes les ressources possibles pour leur développement. De l’autre, une institution régionale qui cherche à harmoniser les pratiques et à préserver la stabilité du système financier dans son ensemble.
L’enjeu est de taille
Comment concilier les intérêts nationaux avec les impératifs de la stabilité financière régionale ? La réponse à cette question pourrait bien redessiner les contours de la gouvernance économique en Afrique centrale.
Alors que le bras de fer se poursuit, tous les yeux sont rivés sur les négociations à venir entre le Cameroun et la Cobac. L’issue de ce conflit pourrait créer un précédent et influencer la gestion future des avoirs en déshérence dans toute la région. Une chose est sûre : ce débat sur les “trésors oubliés” est loin d’être tombé dans l’oubli.
Armand Ougock
Bras de fer financier en Afrique centrale : La Cobac et le Cameroun s’affrontent sur le sort des avoirs oubliés
